Né le 7 avril 1912 à Fécamp
(Seine Maritime), Jean Marie Accart
débute sa carrière professionnelle comme marin à
la Compagnie Générale Transatlantique avant d'entrer dans
la marine nationale à son vingtième anniversaire. Il est
tout d'abord affecté sur le Cuirassé Bretagne en avril
1932. Trois mois après le début de son service, il est
versé à sa demande à l'Aéronautique Navale.
Ayant obtenu son brevet de pilote en mai 1933, il est affecté
à l' Escadrille 3S1 avec le grade
d'Enseigne de Vaisseau de 2e Classe. L'unité, qui est basée
à Hyères, dans le Var, est équipée d'hydravions
CAMS 37. Promu Enseigne de Vaisseau de 1er Classe en avril 1935, il
se porte volontaire pour rejoindre l'Armée de l'Air.
En décembre 1935, il est transféré à
la 1ere Escadrille du GC I/5, encore équipé
de Nieuport 622. En 1936, les Dewoitine 500 et 501 viennent les remplacer.
Devenu commandant de l'Escadrille en février 1937, Accart
compte 1317 heures de vol en février 1939. La même année,
il participe aux essais du Curtiss H-75 de construction américaine
et destiné à équiper plusieurs escadrilles du
GC I/5.
Lorsque la seconde Guerre Mondiale éclate, la 1ere Escadrille,
sous le commandement du Capitaine Accart,
se trouve à Suippes.

Curtiss H 75 A-1 N° 49 du
capitaine Jean Accart, - 1ère
Escadrille du G.C. 1/5 en septembre 1939
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CAMPAGNE
DE FRANCE
11 janvier 1940
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Jean Accart
remporte sa première victoire probable, en collaboration,
le 11 janvier 1940. Ce jour là, une patrouille légère
vole près de la frontière près de Sedan.
Le Sergent Muselli et le Capitaine
Accart interceptent un Do 17
qui se réfugie de l'autre coté de la frontière
en plongeant, ne permettant d'accorder qu'une victoire probable
malgré les dommages apparents causés à
l'appareil allemand.
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10 mai 1940
 
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Le 10 mai, l'offensive allemande débute à l'Ouest.
Dès 4 h 55 du matin, une patrouille légère
décolle. Le Capitaine Accart
et le Sergent Perina revendiquent
un Do 17 près de Mirecourt à 5 h 25 en collaboration
avec deux pilotes du GC I/4 (Sergents
Bès et Lacroix).
A 17 h 00, se sont 21 Do 17 du III./KG
3 qui se présentent sur Suippes. Trois appareils
de la 1ere Escadrille et 6 de la seconde décollent
pour intercepter les bombardiers. Après être
parvenu à disloquer la formation ennemie, les français
parviennent à détruire 7 bombardiers qui seront
tous homologués. En compagnie du Sergent Perina,
le Capitaine Accart revendique
3 bimoteurs, bataille dont il fera le récit détaillé
dans son livre " chasseur du ciel " écrit
alors qu'il se trouve en convalescence après sa blessure
du 1 juin sur laquelle nous reviendrons plus loin. Après
avoir touché un premier Dornier au moteur gauche, il
s'attaque à un autre Dornier dont il arrose copieusement
l'habitacle avant de voir les occupants évacuer l'appareil.
L'un d'entre eux, en voulant déployer son parachute
trop tôt, reste bloqué et s'écrasera avec
l'appareil qui continue sa course vers le sol. Enfin, avec
ses dernières munitions, il abat un troisième
bombardier.
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11 mai 1940
 
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Le lendemain, se sont des He 111 que les pilotes
français interceptent. Alors que 6 parviennent à
s'échapper, 3 appareils du III./KG
53 sont pris en chasse par les S/C Morel
et Vuillemain et par le Cpt
Accart. Accart
et Morel attaquent l'appareil
de gauche alors que Vuillemain
s'en prend à celui de droite. L'appareil de gauche, dont
l'un des moteur fume, est attaqué par Perina,
obligeant l'appareil à se poser dans un champ à
Souilly-Semmes à 15 h 30. Accart
et Morel rejoignent alors Vuillemain
pour achever l'ailier droit dont l'un des moteurs émet
une épaisse fumée noire. L'avion tombe à
15 h 37 près de Saint Mihiel. Utilisant ses dernières
munitions, Accart se place
derrière le troisième Heinkel qu'il laisse avec
les trains sortis, un moteur arrêté et l'autre
fumant. La victoire ne sera cependant accordée que comme
probable, Accart n'ayant pu
assister à sa chute obligé de rentrer faute de
carburant.
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12 mai 1940
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En ce début mai, les jours se suivent
et les missions s'enchainent. Dès le lendemain, nouvelle
rencontre avec l'ennemi. Un premier combat se déroule
à 15 km au Nord de Sedan dès 8 h 15 du matin,
suivi d'un second à 8 h 25, puis un dernier à
8 h 40. Lors du premier combat, le Capitaine Accart
se lance à la poursuite d'un Dornier Do 215 isolé.
Parvenant à se placer à moins de 50 mètres
derrière lui, son H-75 est pris dans les remous des moteurs
du Dornier et ne parvient pas à se stabiliser. Dans un
court moment de flottement, le mitrailleur arrière de
l'appareil Allemand parvient à ajuster parfaitement son
tir qui traverse la vitre avant de l'appareil d' Accart
qui d'instinct baisse la tête, la balle venant se loger
dans la l'appui-tête du siège. Accart
s'en sort avec des blessures légères liées
aux éclats du pare-brise.
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14 mai 1940
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Le 14 mai, vers 10 h 00, en compagnie du Sergent
Muselli, il parvient à
remporter une victoire probable contre un He 111 du 7./KG
53 alors qu'il s'apprêtait à atterrir.
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18 mai 1940
 
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Après 4 jours sans succès, le
18 mai permet à Jean Accart
d'ajouter 3 nouvelles victoires à son palmarès
au cours d'une mission qui débute à 14 h 15. En
raison du plafond bas, les patrouilles chargées d'assurer
la protection du débarquement de troupes en gare de Fismes
se sont partagées entre une patrouille basse, située
sous le plafond nuageux et une patrouille haute. Accart
reste en-dessous alors que Marin-la-Meslée
prend la direction de la patrouille du dessus. C'est ce dernier
qui signale, à 14 h 45, le premier la présence
des bombardiers provoquant le regroupement des 9 appareils français
qui se lancent à l'attaque des bombardiers. Le combat
est très violent et si les français abattent 6
bombardiers, c'est au prix de la perte de 4 appareils détruits,
tous les autres étant plus ou moins gravement endommagés.
Accart attaque dès sa
sortie de la couche nuageuse et parvient à remporter
rapidement sa première victoire de la journée
contre l'avion guide de la formation ennemie en compagnie du
Capitaine Vasatko.
Accompagné de Vasatko,
Périna
et du Sous-Lieutenant Rey,
il parvient à abattre un second bombardier qui s'écrase
à l'est de Soissons. Ne disposant plus que des deux mitrailleuses
de capot, il s'associe avec Muselli
pour attaquer un troisième appareil. il provoque l'arrêt
du moteur droit et touche le moteur gauche qui commence à
fumer. L'avion s'écrase entre Fismes et Laon. Accart
aura tiré 2200 cartouches au total au cours du combat.
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26 mai 1940
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Après une longue période de 12 jours sans nouvelle
victoire, le Capitaine Accart
renoue avec le succès le 26 mai. Ce jour là,
en compagnie de 8 autres pilotes, il participe à la
destruction d'un He 111 à 12 h 30 près de Châtillon-sur-Bar
et d'un autre près de Boult aux Bois.
Le 28 mai 1940, alors qu'il se rend à l'usine Bourges
pour récupérer des Curtiss H-75 neufs, il doit
faire face à l'intransigeance d'un officier qui lui
refuse l'accès aux appareils pour des raisons administratives.
Excédé, Accart
menace le dit officier de son arme, assouplissant les termes
d'un dialogue jusque là peu efficace. Il rentrera le
soir même aux commandes d'un H-75 tout neuf.
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1 juin 1940
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Le 1er juin 1940, une patrouille double décolle sur
alerte à 13 h 20 mais ne trouve rien sur le secteur
de Langres - Gray. Les trois hommes de la patrouille se posent
à Dijon pour faire le plein. La radio ayant signalé
des bombardiers remontant la vallée du Rhône,
ils se dirigent dans leur direction. Ils arrivent sur place
en même temps que 5 Dewoitine du GC
II/7. Les He 111 se trouvent dans le secteur de Pontarlier.
Alors que les D 520 s'occupent du centre et de l'aile droite,
les 3 Curtiss attaquent l'aile gauche de la formation allemande.
Accart parvient à
atteindre rapidement un Heinkel qui commence à fumer.
En retour, l'un des mitrailleurs du bombardier riposte et
atteint sévèrement le Curtiss " 151 "
du Capitaine Accart qui est
très grièvement blessé, notamment par
les éclats d'une balle de mitrailleuse MG 17 de 7,92
millimètres qu'il reçoit entre les yeux. A moitié
inconscient, il se rend compte que l'avion pique et après
être parvenu à ouvrir la verrière il saute
en parachute. En quittant la cabine, il heurte l'empennage.
Blessé au bras, à la mâchoire, il souffre
aussi d'une fracture ouverte de la jambe gauche. Lorsqu'il
touche le sol, il est inconscient et ne reprend ses esprits
que dans l'ambulance qui le conduit à l'hôpital.
Pour lui, la Campagne de France se termine.
Lorsqu'il est abattu, Jean Accart
est titulaire de douze victoires sûres et quatre probables.
Il n'y a guère de doute que, sans cette blessure, il
aurait été largement en tête de tous les
pilotes de chasse de l'Armée de l'air et de la Royal
Air Force en 1940, devançant son ami, adjoint et remplaçant
Edmond Marin la Meslée.
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Dirigé d'urgence vers l'hôpital Granges Blanches de Lyon,
Accart refuse que l'on extraie la
balle située dans sa boite crânienne de peur de perdre
la vue. Pas encore totalement remis, il s'enfuit le 16 juillet 1940
avec sa famille, à Nice, en zone non occupée. Affecté
à l'Etat-Major le 1 novembre, il reprend l'entrainement en
vol et profite de sa convalescence pour écrire "Chasseurs
du Ciel", un témoignage sur l'action de son groupe pendant
la guerre.
D'après son ami Yves Michelet, historien de l'Armée
de l'air de 1940, Jean Mary Accart
fut sans aucun doute l'un des meilleurs pilotes de chasse et, surtout,
l'un des meilleurs chefs d'unités de chasse du monde pendant
la Seconde Guerre mondiale. L'escadrille qu'il commandait en 1939-40,
la première escadrille du Groupe de chasse
I/5, fut celle qui obtint, de très loin, le plus de victoires
en combat aérien, sur environ cinquante-trois escadrilles ayant
participé à la Campagne de
France.
En novembre 1941, il prend le commandement de la nouvelle section de
perfectionnement à la chasse de l'école de l'Air de Salon.
Mis en congé d'armistice, en novembre 1942, il passe en Espagne
avec plusieurs de ses élèves. Interné en Espagne,
il arrive en Afrique du Nord après sa libération et
prend le commandement du Sq 345 - GC II/2 Berry,
lors de sa création le 16 janvier 1944. L'unité est
équipée de Spitfire IX, un appareil de chasse de grande
qualité mais l'absence d'appareils allemands dans le ciel de
France conduit l'unité à réaliser principalement
des missions d'escorte et d'attaque au sol. Le Groupe n'obtiendra
que quelques victoires mais le Commandant Accart
ne parviendra pas à enrichir son tableau personnel. Il reste
au front jusqu'en octobre puis part aux États-Unis suivre les
cours de la Command and General Staff School à Fort Leavenworth.
Affecté au bureau d'études et plans, il passe à
l'inspection générale de l'armée de l'Air peu avant
la fin des hostilités.
Jean Accart fut l'un des très
rares hommes, spécialement parmi les militaires de carrière,
à avoir dit " Non " au général de Gaulle,
en face et en le regardant dans les yeux. Il n'a jamais accepté
de faire de la politique. C'était un homme unique, d'un calme,
d'une modestie et d'une bonté inégalés, d'une
intelligence rare. Sa modestie, notamment, est proverbiale. Ceux qui
l'ont connu semblent tous éprouver les mêmes sentiments
à son égard : un grand respect mêlé d'affection,
une très grande admiration, souvent même une véritable
vénération. Selon Yves Michelet, tout cela est parfaitement
justifié.

Nommé lieutenant-colonel, il devient chef du cabinet de l'état-major
de l'armée de l'Air en décembre 1947, puis directeur adjoint
du CEV à Brétigny, en mars 1948.
Colonel, inspecteur de la chasse, en juillet 1951, il commande la
BA 112 de Reims en septembre et devient sous-chef de l'EMAA quatre
ans plus tard. Le 21 novembre 1960, il est nommé commandant
de la 1ère CATAC (Commandement Aérien Tactique) et FAFA
(Forces Aériennes Françaises en Allemagne) et promu
général de division en janvier 1961. Après différents
postes, il termine sa carrière comme général
de corps d'armée et inspecteur des programmes et fabrications
d'armement le 30 mars 1965 avec un total de 3845 heures de vol à
son actif, essentiellement sur avion de chasse.
Jean Accart, grand-croix de la Légion
d'honneur, était titulaire de la croix de guerre avec onze
citations et de la médaille de l'Aéronautique.
Jean Marie Accart s'est éteint
le 19 août 1992.
NB : L'unité tactique de l'escadrille est la patrouille, laquelle
peut-être organisée comme suit :
- Patrouille simple : 3 avions.
- Patrouille légère : 2 avions.
- Patrouille double : 6 avions (2 patrouilles simples).
- Patrouille double légère : 4 avions (2 patrouilles
légères).
- Patrouille triple : 9 avions (3 patrouilles simples).
- Patrouille triple légère : 6 avions (3 patrouilles
légères).
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