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GUERRE de COREE
LA PAIX MANQUEE
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Au début de l'année 1951, les États-Unis voyaient encore dans la guerre de Corée un conflit de second ordre, risquant de détourner leur attention de ce qui constituait à leur avis l'essentiel : la menace soviétique. Ainsi en témoigne cette déclaration devant le Congrès d'un général de l'armée de terre américaine, Omar Bradley, au mois de mai de cette même année .« Une intervention contre la Chine communiste ne constituerait pas une initiative décisive ; elle ne garantirait ni la fin des hostilités en Corée ni une défaite rapide des Chinois. » Il ne fait aucun doute, cependant, que les Américains auraient pu facilement mettre à genoux la Chine communiste à cette époque si le risque d'un conflit généralisé avec l'Union Soviétique n'avait pas existé. Il est significatif que l'US Navy n'ait déployé dans les eaux coréennes que trois porte-avions rapides du type Essex (36 000 tonneaux), dotés d'appareils d'attaque à moteurs à piston, tandis que la VIe flotte, en Méditerranée, réunissait trois porte-avions de 45 000 tonneaux, les USS Midway, Coral Sea et Franklin D. Roosevelt, embarquant des bombardiers à propulsion mixte North American AJ-1 Savage chargés d'armes nucléaires. Le meilleur appareil en service dont disposait alors l'US Air Force était le North American F-86A Sabre. Tout laissait croire qu'un seul wing de ces chasseurs, une fois engagé sur le théâtre coréen, serait à même de tenir en échec les dizaines de MiG-15 que pouvaient mettre en ligne les forces communistes dans la zone immédiate des combats. Une nouvelle version du Sabre, le F-86E, il est vrai, avait été hâtivement mise au point avec un dispositif de surpuissance. Cette variante commença à être fabriquée en série pendant l'hiver 1950-1951, mais les premières livraisons aux forces opérant en Corée ne devaient pas intervenir avant le mois de septembre suivant.
Pour ce qui est des bombardiers, le quadriréacteur
North American B-45 Tornado équipait l'USAF depuis quelque temps,
mais il était à craindre que son introduction sur le théâtre
coréen n'incitât, par contrecoup, l'Union Soviétique
à fournir à la Chine communiste des appareils de type
similaire (en l'occurrence, le bombardier à réaction Iliouchine
I1-28, qui ne devait arriver en Chine qu'en 1953). Le commandement des
forces des Nations unies dut se contenter de deux wings de Douglas B-26
et de trois autres de Boeing B-29 - même si ces derniers appareils,
opérant à ce stade de la guerre presque exclusivement
de jour, avaient besoin d'être escortés par un grand nombre
de chasseurs. L'échec de l'offensive communiste du printemps 1951 contre la Corée du Sud fut suivi d'une stabilisation du front au sol. C'est cependant à ce moment qu'au vu de l'intervention chinoise les Nations Unies furent amenées à raidir leur position et à renoncer à leur objectif initial - la réunification du Nord et du Sud -, les États-Unis ayant fait savoir qu'ils ne toléreraient jamais l'instauration d'un régime communiste en Corée du Sud. Des pourparlers en vue d'une trêve s'ouvrirent malgré tout à Kaesong le 10 juillet. Alors que la situation restait bloquée sur terre
(le long d'un front traversant en diagonale le 38° parallèle),
chacun des deux camps, soucieux de s'asseoir en position de force à
la table des négociations, redoubla d'effort pour s'assurer la
maîtrise de l'air. Le Général MacArthur, commandant
en chef des forces des Nations Unies et partisan d'une extension du
conflit, venait d'être remplacé par le General Matthew
B. Ridgway, Washington ayant réaffirmé à cette
occasion sa triple intention de « maintenir les États-Unis
en dehors d'une guerre avec l'Union Soviétique et la Chine, de
repousser l'agression et de restaurer la paix ». Au moment de l'ouverture des négociations, les services de renseignements des Nations unies estimaient à 1050 le nombre d'avions de fabrication Soviétique équipant les forces aériennes Chinoises (Pékin disposait notamment de 445 MiG-15, de 250 Iliouchine I1-10 et de 355 Lavotchkine La-9, Lavotchkine La-11, Yak-9 et Tupolev Tu-2). La zone des combats en Corée se trouvait dans le rayon d'action d'environ sept cents de ces appareils dont la capacité offensive était loin d'être négligeable. |
L'opération Strangle L'une des dernières opérations aériennes
de grande envergure mises sur pied avant que Mac Arthur ne soit relevé
du commandement des forces des Nations unies en Corée fut une
tentative pour isoler, au moyen de raids intensifs, les lignes communistes
de leurs sources de ravitaillement et de renforts. L'opération
Strangle prévoyait des attaques contre tous ports, routes, voies
ferrées et tunnels situés à l'intérieur
d'une zone comprise entre 38° 15" et 39° 15" N. Les
bombardiers moyens et les avions d'attaque de l'US Air Force devaient
intervenir dans le secteur ouest du front, les appareils embarqués
de la Task Force 77 (comprenant les porte-avions USS Bon Homme Richard,
USS Boxer et USS Princeton) dans la partie centrale et les formations
d'attaque basées à terre de l'US Marine Corps dans la
zone orientale, à proximité des côtes de la mer
du Japon. En raison de la grande vulnérabilité de leur réseau ferroviaire, les communistes utilisaient quasi exclusivement de rudimentaires chemins de terre pour le transport de leur matériel et de leurs vivres à proximité du front ; ces voies pouvaient d'ailleurs être assez facilement réparées. Malgré l'utilisation de napalm, roquettes et bombes à retardement - et le lancement d'attaques incéssantes, de jour comme de nuit -, les forces aériennes des Nations unies ne parvinrent pas à paralyser l'approvisionnement des troupes communistes. Des missions de reconnaissance ne devaient révéler qu'une faible diminution du trafic terrestre aux abords des lignes ennemies. |
L'opération Strangle ne donna pas les résultats escomptés, l'intensification de l'activité aérienne alliée dans la zone du front incitant les Chinois à réagir vigoureusement. Les communistes commencèrent par lancer leurs biplans légers Polikarpov Po-2 contre l'aérodrome de Suweon, au sud de Séoul. base à partir de laquelle opéraient les F-86. Volant de nuit à basse altitude, les Po-2 larguèrent des bombes à fragmentation de 10 kg au-dessus des aires de stationnement des chasseurs - une tactique qui n'était pas sans rappeler celle utilisée par les Soviétiques comme par les Allemands sur le front de l'Est pendant la Seconde Guerre mondiale. Lors du premier raid de ce type, mené par un seul avion le 17 juin à l'aube, la base fut prise totalement de court ; deux bombes détruisirent au sol un Sabre du 335th Squadron et en endommagèrent huit autres (dont quatre gravement). Ce qu'en sept mois les MiG-15 n'avaient pas réussi à accomplir, un biplan volant à guère plus de 150 km/h l'avait réalisé en quelques secondes. Ces raids de saturation devaient constituer une menace constante non seulement pour les forces aériennes des Nations unies, mais aussi pour leur infrastructure au sol. Les attaques de Po-2 contre Suweon marquèrent le début d'une série d'actions destinées à chasser les Sabre F-86 de la zone du front ainsi que de l'espace aérien situé audessus du fleuve Yalou (à la frontière entre la Corée et la Chine), baptisé « MiG-Alley » par les Américains. Deux F-86 furent abattus par des MiG-15 au cours de la seule journée du 17 juin, un troisième subissant le même sort le 22, alors qu'il escortait des Lockheed F-80 qui menaient un raid sur l'aérodrome nord-coréen de Sinuiju. En contrepartie, six MiG-15 furent détruits en vol par des Sabre au cours des batailles aériennes livrées entre le 17 et le 19 juin. Le 28, le Colonel Eagleston, commandant le wing de Sabre en mission, faillit lui-même être abattu (son appareil fut touché par un obus de 37 mm et deux de 23 mm tirés par un MiG). Malgré de graves dommages à l'arrière et la perte de deux aubes de turbine, Eagleston réussit à ramener son appareil à Suweon, où il atterrit en catastrophe. |
En dehors des raids de Po-2, les communistes lancèrent
une seule attaque de nature différente pendant le mois de juin.
Le 20, en effet, une trentaine de I1-10, escortés par des Yak-9,
tentèrent un raid contre un îlot côtier tenu par
les forces des Nations Unies ; interceptés par un wing de Mustang
de la South African Air Force, ils furent repoussés après
un bref engagement. Au cours du mois de juillet, neuf autres MiG-15 furent
abattus, dont sept par des Sabre. Le 8 juillet, une formation de F-51
fut attaquée par des appareils ennemis, qui furent à leur
tour assaillis par des F-86, trois MiG tombant en flammes. L'un d'eux
fut descendu par le nouveau commandant en second du 4th
Wing, le Colonel Francis S. Gabreski,
le célèbre as de la chasse américaine de la Seconde
Guerre mondiale. (Gabreski qui avait jadis inscrit à son actif
trente et une victoires dans le ciel de l'Europe devait en remporter
six et demie au-dessus de la Corée). Suivirent alors quelques semaines d'inactivité
de la part des forces aériennes communistes, en dépit
des raids ininterrompus de l'opération Strangle. Des attaques
de B-29 continuèrent à être lancées, malgré
l'efficacité croissante des tirs antiaériens de l'ennemi
(dirigés par radar, ils atteignaient désormais des formations
de bombardiers volant à plus de 6 000 m d'altitude). Sur la centaine
de B-29 engagés sur le théâtre coréen, pas
moins de treize furent mis hors de combat en juin et juillet, et vingt
membres de leurs équipages périrent. Le 12 août, le centre portuaire nord-coréen de Najin (ou Rashin, au sud-ouest de Vladivostok), qui constituait par ailleurs un noeud ferroviaire vital commandant l'accès vers la Mandchourie (distante de seulement 27 km), était assailli par une formation de B-29 équipés de Shoran. Mais, en raison des restrictions imposées par le département d'État américain afin d'éviter tout survol du territoire chinois, pratiquement pas une seule bombe ne toucha la ville, ce qui donne une idée de la maîtrise des équipages. Un second raid, lancé le 22 août, avorta également, les B-29 avant été contraints de s'en prendre à des objectifs secondaires en raison du mauvais temps. Des ordres interdisant des attaques ultérieures furent annulés par le président Truman, une troisième sortie contre Najin étant effectuée par trente cinq B-29 le 25 août. Du fait de la trop grande distance qui séparait les bases aériennes des Nations unies de l'objectif, l'escorte fut assurée par des chasseurs à réaction de l'US Navy - des McDonnell F2H-2 Banshee et des Grumman F9F Panther - opérant à partir de l'USS Essex (de retour depuis peu dans les eaux coréennes après avoir été remplacé pendant quelques semaines par l'USS Princeton). Vingt-neuf des bombardiers prenant part au raid atteignirent Najin et réussirent à larguer 97 % de leurs bombes (soit plus de 300 t) sur les installations portuaires et la gare de triage, provoquant des dommages considérables. La chasse ennemie n'opposa aucune résistance, et tous les B-29 retournèrent à leur base. |
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C'est à cette époque qu'une deuxième
brigade de MiG-15, devenue pleinement opérationnelle, fut implantée
sur la base chinoise d'Antoung, à proximité de la frontière
coréomandchoue. Sa présence étant rapidement détectée
par les appareils de reconnaissance des Nations unies, les F-86 du 4th
Fighter Interceptor Wing furent transférés à
Kimpo, au nord-ouest de Séoul. Entre-temps, certaines des imperfections
du Sabre avaient été corrigées. En raison d'une
nette amélioration dans les procédures de maintenance,
le dispositif de largage de ses réservoirs auxiliaires, qui avait
posé à plusieurs reprises de fâcheux problèmes
en plein combat, et le mécanisme de déclenchement de sa
photomitrailleuse avaient été perfectionnés. En août, quatre MiG-15 furent détruits
dans des batailles aériennes contre des Sabre, sans pertes du
côté américain, mais le mois de septembre marqua
un accroissement notable de l'activité des forces aériennes
communistes. Sur les neuf cent onze MiG aperçus et affrontés
pendant cette période, seulement quatorze devaient être
descendus (treize par des F-86 et un par un Republic F-84). Parmi les
aviateurs victorieux figuraient le Captain Richard
S. Becker et le Captain Ralph D. Gibson,
qui devinrent respectivement les deuxième et troisième
pilotes américains à avoir abattu cinq avions à
réaction ennemis (le premier, le Major James
Jabara, avait atteint ce score le 20 mai ; il devait devenir le
deuxième as des forces aériennes des Nations unies en
Corée en s'adjugeant un total de quinze MiG). C'est également en septembre qu'eurent lieu
les premières livraisons de F-86E au 4th
Fighter Interceptor Wing, livraisons de nécessité
immédiate, il est vrai consécutives à de lourdes
pertes et ne résultant en rien d'un plan de rééquipement
bien étudié. Le 4th Wing,
en effet, ne devait se séparer de son dernier F-86A que dix mois
plus tard. En fait, le premier wing à être entièrement
doté de F-86E allait être le 51th
Fighter Interceptor Wing. Le 16 septembre, par ailleurs, les opérations aéronavales américaines en mer du Japon durent être temporairement interrompues après qu'un Banshee, endommagé pendant une mission de combat, eut raté les câbles d'appontage sur le pont de l'USS Essex, rebondi au-dessus des barrières d'arrêt et percuté de plein fouet les appareils parqués à l'avant. Un violent incendie se déclara, et avant qu'il ait pu être éteint quatre avions furent détruits par les flammes, huit hommes périrent et vingt-sept autres furent gravement brûlés. L'Essex, qui dut faire route vers le Japon pour y subir des réparations, ne devait reprendre la mer que le 3 octobre. De ce fait, les unités de l'US Navy opérant au large de la côte est de la Corée se trouvèrent privées de toute couverture de chasseurs à réaction pendant trois semaines. |
Strangle prit fin d'elle-même en septembre, quand
l'état-major des forces des Nations Unies reconnut enfin qu'aucune
campagne de raids aériens, aussi intensive fût-elle, ne
détruirait complètement le lacis de routes et chemins
situé immédiatement à l'arrière des lignes
ennemies. En remplacement, une nouvelle opération fut mise sur
pied, avec pour objectif la destruction du réseau ferroviaire
nord-coréen, indispensable aux communistes pour le ravitaillement
de leurs troupes (à proximité du front, vivres et matériel
étaient transférés à bord de camions avant
d'être acheminés jusqu'à la zone des combats). Dès
que les communistes s'aperçurent du changement de stratégie
des Nations Unies, une troisième brigade de MiG-15 fut dépêchée
vers le sud (il s'agissait cette fois de MiG-15 bis, variante équipée
du turboréacteur VK-1 au lieu du RD-45 utilisé jusquelà).
Aussitôt, les pertes en B-29 commencèrent à augmenter
; ainsi, dans la seconde moitié du mois d'octobre, cinq d'entre
eux furent abattus, huit étant gravement endommagés, tandis
que cinquante-cinq membres d'équipage périrent en mission.
Neuf MiG furent descendus le 16 octobre, mais la plus importante bataille
aérienne du mois eut lieu le 22, lorsque 8 B-29 accompagnés
de 55 F-84 et 34 F-86 effectuèrent un raid contre Namsi. Soudain,
une centaine de MiG apparurent à l'horizon et assaillirent l'escorte,
suivis bientôt d'une cinquantaine d'autres qui fondirent directement
sur les bombardiers. En cinq minutes, trois B-29 et un F-84 furent abattus,
tandis que quatre bombardiers étaient sévèrement
endommagés. En contrepartie, six MiG furent détruits en
vol. Face à l'opposition de plus en plus vigoureuse de la chasse ennemie - des escadres de près de 80 MiG étaient désormais fréquemment mises en oeuvre -, le commandement des Nations Unies dut renoncer à utiliser les B-29 dans des raids diurnes. Il décida en revanche de lancer un plus grand nombre d'attaques nocturnes à partir des trois porte-avions américains croisant au large des côtes de Corée avec des Vought F4U-5N Corsair et des Douglas AD-4N Skyraider. Bien que ces derniers fussent chargés en temps normal d'assurer la protection des porte-avions pendant la nuit, l'absence d'activité aérienne ennemie au-dessus de la mer permit leur emploi, dans des sorties nocturnes, contre le réseau ferroviaire nord-coréen. C'est également à cette époque que le premier squadron d'attaque de l'US Marine Corps équipé de Skyraider (le VMA-121) se joignit aux opérations. |
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Sources
Texte : Encyclopédie de l'Aviation - Editions Atlas
STARS & BARS - Frank Olynyk - Grub Street Editions
F-51 Mustang units over Korea - Warren Thompson - Osprey frontline colour
1
F-84 Thunderjet Units over Korea - Warren Tompson - Osprey frontline colour
3
Korean War Aces - Robert F Dorr, Jon Lake, Warren Thompson - Osprey aircraft
of the Aces 4
F-86 Aces of the 51st Fighter Wing - Warren Thompson - Osprey aircraft of
the Aces 70
F-86 Aces of the 4th Fighter Wing - Warren Thompson - Osprey aircraft of the
Aces 72
F-80 Thunderjet Units over Korea - Warren Thompson - Osprey frontline colour
5
F-86 Sabres of the 4th Fighter Interceptor Wing - Warren Thompson - Osprey
frontline colour 6
B29 Superfortress Units of the Korean War - Robert F Dorr - Osprey Combat
Aircraft 42
Korea The Air War 1950 / 1953 - Jack C Nicholls & Warren E Thompson
MIG Alley - Larry Davis - Squadron Signal Publications