Godefroy Scamaroni est né
le 24 octobre 1914 à Ajaccio en Corse. Fils de préfet,
il fait ses études primaires à Saint-Brieuc et ses études
secondaires au collège de Brive puis au lycée de Charleville-Mézières.
Il passe son Baccalauréat à Paris et s'oriente vers
des études de Droit. En 1934, il est licencié de la
Faculté de Droit de Paris; devançant alors ses obligations
militaires, il entre à l'Ecole de Saint-Maixent de laquelle
il sort sous-lieutenant d'Infanterie. Ensuite, il se dirige comme
son père vers la carrière préfectorale. En février
1936, il devient chef de cabinet du préfet du Doubs qu'il suit
à Caen dans le Calvados en décembre 1937.
En septembre 1939, chef de cabinet du préfet du Calvados,
il refuse le statut d'"affecté spécial" qu'on
lui propose et rejoint le 119e Régiment
d'Infanterie basé à Cherbourg. En décembre,
devant l'inaction résultant de la "drôle de guerre",
il obtient d'être affecté dans l'Aviation et prépare,
à Tours, son brevet d'observateur en avion qu'il passe avec
succès le 17 mai 1940. Deux jours plus tard, il est blessé
en combat aérien et évacué sur Caen. Sans nouvelles
de son unité, il combat aux côtés d'une compagnie
d'infanterie puis parvient à rallier Pau pour y retrouver sa
formation aérienne. Entre-temps, ayant entendu parler du général
de Gaulle et de son appel du 18 juin, Fred Scamaroni se décide
à continuer la lutte aux côtés de la France libre.
A Saint-Jean-de-Luz, le 21 juin, il embarque sur un croiseur polonais,
le Sobieski, et parvient à Londres trois jours plus tard. Immédiatement,
il s'engage aux Forces
françaises libres (FAFL)
et est dirigé, avec l'Armée de l'Air, au camp de Saint-Atham.
Volontaire pour l'opération de Dakar, il est chargé
d'une mission particulièrement délicate consistant à
remettre en main propre au gouverneur général Boisson
une lettre du général de Gaulle. Embarqué le
6 septembre à Liverpool sur le croiseur Australia, il arrive
à Freetown en Sierra-Leone le 17 septembre et s'envole avec
huit aviateurs volontaires pour l'aéroport de Ouakam près
de Dakar où ils doivent "fraterniser" avec les soldats
de Vichy et les convaincre de rejoindre les Français libres.
Immédiatement arrêtés, ils sont emprisonnés
dans des conditions pénibles, condamnés à mort,
menacés d'exécution puis rapatriés en France,
ils sont enfin libérés le 28 décembre 1940. Fred
Scamaroni, atteint de malaria, est hospitalisé à
Clermont-Ferrand et libéré le 7 janvier 1941. En février,
il se rend à Vichy et, ne pouvant reprendre la carrière
préfectorale (il a été révoqué
en octobre 1940 en raison de ses actions gaullistes), il trouve un
emploi de simple commis au Ministère du Ravitaillement ; bien
décidé cependant à poursuivre le combat, il se
lance parallèlement à ses occupations officielles dans
la résistance et le renseignement. Il fonde le réseau
"Copernic" et se rend en Corse, son pays natal, en avril
puis octobre 1941, son titre d'agent FFL ayant été confirmé
par Londres qui juge plus prudent, à cause de la Gestapo, de
le rappeler en décembre 1941.
Revenu à Londres via la Bretagne, et par l'intermédiaire
du réseau Overcloud de Joël Le Tac, il est affecté
au Bureau central de Renseignements et d'Action (BCRA), section "A"
(missions) avec le grade de capitaine, il effectue différentes
missions de liaison et de renseignement dont la dernière, le
20 décembre 1942, à Alger. Il travaille également
à un grand projet de libération de la Corse approuvé
par le général de Gaulle. Le 7 janvier 1943, dans le
cadre de la mission Sea Urchin, le capitaine Fred
Scamaroni, devenu le capitaine François Edmond Severi (alias
Pot, alias Grimaldi), est débarqué par un sous-marin
avec un radio et un agent britannique aux environs d'Ajaccio. Chef
du Réseau R 2 Corse, il doit préparer la libération
de l'île destinée à devenir la tête de pont
du débarquement allié en Méditerranée
pour la France; sa mission consiste aussi à tenter d'unifier
les diverses composantes de la résistance insulaire ; il prend
contact avec les agents locaux de résistance, prépare
le terrain pour des parachutages, recrute des hommes, etc.
Alors que le réseau est en pleine activité, son radio,
trahi, est arrêté par l'OVRA (contre-espionnage italien)
le 18 mars 1943.
Après trente heures de torture, il reconnaît le capitaine
Severi comme son chef. Dans la nuit du 18 au 19 mars, Fred
Scamaroni est arrêté au domicile qu'il occupe à
Ajaccio et, bien que soumis à son tour à des tortures
effroyables, ne dit rien à ses bourreaux. Ramené dans
sa cellule de la citadelle d'Ajaccio, plutôt que de risquer
de parler et d'être reconnu sous sa véritable identité,
il préfère se trancher la gorge avec un fil de fer,
laissant un ultime message écrit avec son sang : " Vive
la France, vive de Gaulle. "
Il décède trois heures plus tard, le 19 mars 1943 à
20 heures, sans avoir rien dévoilé de sa mission. Il est
inhumé dans la fosse commune du cimetière d'Ajaccio.
Par décret du 26 février 1945, Fred
Scamaroni a été nommé préfet à
titre posthume pour compter du 17 juin 1940.