Batailles ciel de gloire - histoire des as de l\'aviation de 1914 à nos jours



 


 

 


 

Dieppe

19 août 1942

Opération jubilée


Le débarquement de Dieppe ou opération Jubilee fut une tentative ratée de débarquement des Alliés en France occupée, menée le 19 août 1942 sur le port de Dieppe. Cette opération laisse un goût amer aux Canadiens car les troupes engagées furent décimées alors que la tournure des opérations aurait dû faire annuler l'opération rapidement et que l'on parle encore d'un second front en Europe, qui est totalement absurde à cette date. Dans l'aube brumeuse d'un jour d'août 1942, une armada de 250 navires de toutes tailles se dirige vers les côtes françaises de la Manche. Elle mobilise près de 8 000 hommes dont plus de 2 000 y laisseront leur vie, pour ce qui sera le plus grand raid de la Seconde Guerre mondiale. 74 escadrilles de chasseurs et de bombardiers en assureront la couverture aérienne.

Pour la première fois dans la Seconde Guerre mondiale, des hommes vont se ruer à l'assaut de ce que les Nazis appellent "Festung Europa", la Forteresse Europe

 

 

Avant la bataille

L'Allemagne étend son emprise de Biarritz à Léningrad, de Oslo à Athènes, de l'Atlantique au Caucase. La victorieuse guerre éclair qu'espéraient Hitler et ses généraux a échoué devant Moscou en décembre 1941, néanmoins la pression exercée sur l'Armée rouge par le commandement allemand, à la tête de 200 divisions très combattives, demeure énorme et les colonnes motorisées nazies progressent à vive allure vers les gigantesques complexes industriels et pétroliers de la Volga.

Demandes géopolitiques

1942, "l'année terrible", voit l'Allemagne triompher sur tous les fronts. Le Royaume-Uni vient de perdre Tobrouk, aux portes de l'Égypte, et le canal de Suez, artère vitale pour son économie de guerre, est directement menacé. L'Union soviétique, au prix de pertes énormes en hommes et en matériel, contient difficilement la progression de l'armée allemande vers le Caucase, aux frontières de l'Iran et de la Turquie. Entre les deux pinces de l'étau, quelques centaines de kilomètres de désert et de montagnes seulement et le rideau fragile de quelques divisions du Commonwealth.

Depuis plusieurs mois, Staline insiste de plus en plus fermement auprès des gouvernements américain et britannique sur l'urgence d'ouvrir un second front à l'ouest de l'Europe afin d'obliger l'Allemagne à redistribuer ses forces et à diminuer ainsi la pression qu'elles font subir à l'Armée Rouge. Roosevelt et l'État-major américain laissent entendre à Molotov, ambassadeur de Staline à Washington, qu'un débarquement pourrait avoir lieu sur les côtes françaises au cours de l'année 1942.

Churchill est très réticent à l'initiative américaine car sa vision politique du conflit le pousse plutôt à considérer qu'un débarquement en Afrique du Nord, et ensuite dans les Balkans "ventre mou de l'Europe", conviendrait mieux aux intérêts britanniques. Néanmoins, afin de donner des gages de bonne volonté aux Russes au moindre coût, car il doute désormais de leur capacité de résister beaucoup plus longtemps à la pression allemande, il accepte qu'une opération de portée limitée soit lancée sur les côtes françaises. Ce sera "l'opération Rutter".

Opération Rutter

L’opération Rutter sera une opération de portée limitée sur les côtes françaises dont le port de Dieppe sera l'objectif.

Lord Mountbatten, proche du roi George VI et chef du Quartier général des opérations combinées depuis mars 1942, est chargé de l'organisation de cette opération, à laquelle participeront la marine et l'aviation britanniques ainsi que quelques navires des Forces navales françaises libres. Les troupes d'assaut seront constituées par des unités du Corps d'armée canadien, commandé par le général Crerar. Aucun militaire canadien ne participe à la planification du raid.[6]

L'opération Rutter doit se dérouler début 8 juillet 1942. Elle est annulée, en raison des très mauvaises conditions atmosphériques qui règnent sur la Manche, alors que les troupes d'assaut sont embarquées depuis plusieurs jours à bord des bateaux qui devaient les déposer sur la côte française ainsi que par la présence de la 10e Panzerdivision qui vient d'être retirée du front de l'Est et mise au repos à Amiens. Pour l'État-major britannique et pour le Général Montgomery, commandant en chef des Forces britanniques du sud de l'Angleterre, l'annulation est définitive, puisque, entre autres raisons, le secret de l'opération ne peut plus être assuré du fait que plusieurs milliers d'hommes ont regagné leur cantonnement à terre. Le succès d'une reprise de l'opération paraît, dans ces conditions, sérieusement compromis.

Tel n'est pas l'avis de Mountbatten et de ses collaborateurs du Quartier général des opérations combinées qui, avec la plus grande désinvolture et soumis par ailleurs aux pressions américaines, décident, de leur propre autorité, la reprise du raid quels qu'en soient les risques. Cette décision est d'autant plus facile à prendre que Montgomery est alors affecté en Égypte et que le Contre-amiral Baillie-Grohman, commandant les forces navales de l’opération, qui avait, lui aussi, manifesté de sérieuses réserves, est remplacé par le Capitaine Hughes-Hallett, bras droit de Mountbatten.

Opération Jubilee

L'opération Jubilee est lancée. Elle repose désormais exclusivement sur les épaules des troupes d'assaut de la 2e division canadienne commandée par le général Roberts. Ses hommes, pour la plupart, ont suivi un entraînement intense au Royaume-Uni mais n'ont jamais été exposés à l'épreuve du combat.

Le 19 août 1942, à 4 h 45, les troupes canadiennes et deux commandos britanniques accompagnés de 50 rangers américains et 15 soldats "Français libres" vont débarquer, sur un front de 20 km en quatre points de la côte de part et d'autre du port de Dieppe où sera porté l'effort principal une demi heure plus tard. Depuis Berneval et Puys, à l'est, jusqu'à Pourville et Quiberville, à l'ouest... une côte inhospitalière, bordée par des plages de galets que surplombent les parois verticales des falaises que l'État-major allemand a truffé de défenses de toutes sortes : batteries de canons à longue portée, mortiers, nids de mitrailleuses, bunkers bétonnés, emplacements de tir individuels. Des réseaux de fil de fer barbelé hauts de plusieurs mètres encerclent la ville et obstruent les rares ravines qui permettent d'accéder au sommet des falaises où l'ennemi s'est retranché. C'est à l'assaut d'une véritable forteresse que 5 000 hommes vont se lancer. 1 200 d'entre eux y trouveront la mort et 3 000 y seront blessés ou faits prisonniers.

Berneval

Au large de Berneval, 23 péniches de débarquement transportent le Commando 3. Sept d'entre elles seulement atteignent la côte. Les autres ont été dispersées à la suite d'un combat avec des navires allemands faisant route sur Dieppe et dont la présence a été signalée à deux reprises par l'Amirauté britannique au Capitaine Hughes-Hallett, commandant les forces navales de l'opération, qui ne reçoit pas les messages... ou les ignore délibérément. La défense allemande est en alerte. L'opération se poursuit.

120 hommes et quelques Rangers américains à bord de 6 péniches débarquent, à l'est de la position qu'ils doivent attaquer. Ils sont immédiatement cloués sur la plage par le feu des défenseurs allemands retranchés au sommet de la falaise et qui tirent comme à l'exercice. Ils luttent âprement pendant plus de 5 heures, puis, succombant sous le poids de leurs morts et de leurs blessés, ils sont contraints de se rendre.

La 7e péniche dépose le Major Peter Young, 3 officiers et 17 hommes à l'ouest de la position, en face de la gorge du "Val au Prêtre" dans laquelle ils s'engagent. Ils grimpent le long de la falaise en s'agrippant aux réseaux de fil de fer barbelés et attaquent avec un armement réduit la batterie côtière de sept canons qui domine la mer et en neutralisent l'action pendant plus de deux heures.

Puys

À quelques centaines de mètres à l'est de l'entrée du port de Dieppe, la falaise de Puys se dresse verticale au-dessus d'une plage étroite, barrée par un mur haut de 4 mètres surmonté par des rouleaux de fil de fer barbelé. Les pièces d'artillerie que les Allemands y ont installées commandent directement l'entrée du port de Dieppe et toutes les maisons qui bordent la falaise et la plage ont été transformées en blockhaus. Les 600 hommes du Royal Regiment of Canada et du Black Watch of Canada lancés à l'attaque ne pouvaient trouver pire comme point de débarquement. La première vague d'assaut aborde le rivage avec 20 minutes de retard sur l'horaire prévu. Le jour est maintenant levé. La défense allemande est en état d'alerte permanente.

Des tirs d'armes automatiques, des explosions d'obus et de grenades, des tirs de mortiers d'une violence inouïe immobilisent les hommes sur la plage, alors que leurs camarades sont tués ou blessés avant même d'avoir pu quitter la passerelle de leur péniche. Un enfer mais aussi une tragédie. En cinq minutes le bataillon est réduit à l'effectif de quelques dizaines d'hommes et le carnage ne fait que s'aggraver au fur et à mesure que débarquent les vagues d'assaut suivantes. À 8h30, après 3 heures de martyr, ce qui reste du Royal Regiment of Canada rend les armes.

Seuls quelques hommes, sous le commandement du Colonel Catto, ont pu dépasser la plage, grimper sur la falaise et s'emparer de deux maisons fortifiées. Mais leur retraite est rapidement coupée. Isolés en terrain ennemi, ils sont contraints de se rendre quelques heures plus tard.

Varengeville

A l'ouest de Dieppe, Lord Lovat, qui s'illustrera plus tard lors du débarquement de Normandie, débarque entre Quiberville et Sainte-Marguerite-sur-Mer avec 160 hommes. Le commando progresse rapidement vers l'intérieur des terres le long de la vallée de la Saâne pour prendre à revers la puissante batterie côtière de 6 canons de 150 mm qui interdit l'entrée du port de Dieppe, tandis que par la valleuse de Vasterival, Mills-Roberts, adjoint de Lovat, et ses 90 hommes attaquent de front. Les deux groupes chargent à la baïonnette, neutralisent la batterie, détruisent les canons, et redescendent sur la plage où ils rembarquent emmenant leurs prisonniers. Modèle d'exécution, ce fut la seule phase de l'opération sur Dieppe qui se déroula comme prévu.

Pourville

Au même moment, à Pourville, le South Saskatchewan Regiment est mis à terre avec mission de tenir la plage et la ville afin de permettre aux Queen's Own Cameron Highlanders of Canada, qui débarqueront une demi-heure plus tard, de faire leur jonction avec les chars du régiment de Calgary qui doivent accoster à Dieppe, en vue d'attaquer l'aéroport de Saint-Aubin et le Quartier général de la division allemande que l'État-major britannique croit situé à Arques.

Le South Saskatchewan Regiment, qui devait aussi s'emparer d'une station de radar située sur la falaise et la détruire après en avoir prélevé les instruments scientifiques, échoue dans sa tentative. Les Queen's Own Cameron Highlanders of Canada progressent de 1,5 km à l'intérieur des terres jusqu'au village de Petit-Appeville. Attaqués par le 571e régiment d'infanterie allemand arrivé en renfort, ils doivent refluer vers la plage où ils retrouvent les hommes du lieutenant-colonel Merritt qui couvrent héroïquement leur retraite sous le feu des défenses allemandes, tandis qu'est coulée la moitié des péniches qui devaient les rembarquer.

Dieppe

L'assaut principal sur Dieppe est lancé à 5h20 par le Royal Hamilton Light Infantry et par l'Essex Scottish Regiment. Au moment où les embarcations approchent de la rive, des chasseurs et des bombardiers légers de la Royal Air Force et de la Royal Canadian Air Force attaquent, tandis que d'autres livrent des combats sans merci aux avions de la Luftwaffe. Les canons de quatre destroyers de la Royal Navy pilonnent sans discontinuer les fortifications allemandes.

Les tirs meurtriers de la défense allemande qui prennent la plage et la Promenade en enfilade sèment la mort parmi les hommes du Royal Hamilton Light Infantry . Ils se lancent à l'assaut, traversent la plage sous un déluge de feu et parviennent, après une heure de combat, à pénétrer dans le casino que les Allemands ont transformé en blockhaus et qui est très puissamment défendu. De petits détachements progressent au-delà de la Promenade et pénètrent dans l'agglomération. Celui que commande le Capitaine Hill atteint même le centre de la ville près de l'église Saint-Rémy, mais, isolés, ses hommes sont bientôt contraints de refluer vers la plage.

Le sergent Hickson et son groupe de 18 hommes dont la mission est de faire sauter le central téléphonique, traversent le casino et le théâtre, pénètrent dans la ville et attaquent, au corps à corps, un point d'appui allemand dont ils éliminent les défenseurs et parviennent à regagner la plage.

A l'est de celle-ci, l'Essex tente à plusieurs reprises de franchir le mur qui le sépare de la Promenade sans y parvenir, tant est intense le feu de l'ennemi. Seul le groupe du Sergent-major Stapleton parvient à ouvrir une brèche dans les barbelés, à traverser le terre-plein de la Promenade et à progresser de maison en maison vers le port.

Les 9 chars du régiment de Calgary qui devaient soutenir l'assaut de la première vague ont été débarqués par erreur trop à l'ouest de la plage et avec 15 minutes de retard pendant lesquelles l'infanterie est privée d'appui-feu. L'effet de surprise qu'ils devaient provoquer est perdu.

29 chars au total ont été débarqués durant l'opération. La moitié d'entre eux seulement atteint la Promenade mais sans pouvoir pénétrer dans la ville. Depuis le début des combats, le Major-général Roberts, commandant en chef des opérations terrestres, ne reçoit à bord du Calpe, que des renseignements fragmentaires et, par conséquent, inexacts sur ce qui se déroule réellement à terre car les moyens de transmission de la plupart des unités à terre sont détruits ou endommagés. Il croit que l'Essex a pu pénétrer dans la ville, alors qu'il ne s'agit que du petit groupe de Stapleton… et afin d'exploiter la situation qu'il pense encore favorable, il prend la décision de faire débarquer les 600 hommes des Fusiliers Mont-Royal. Ce qui ne fait qu'accroître les pertes en vies humaines et ajouter au drame.

A 7 heures, à bord de 26 vedettes, les Fusiliers Mont-Royal approchent sous un feu implacable. À leur tête, le Lieutenant-colonel Ménard, grièvement blessé dès l'accostage, débarque avec ses hommes qui sont immédiatement cloués sur la plage.

Seuls quelques-uns d'entre eux, commandés par le Sergent-major Lucien Dumais, parviennent à pénétrer dans la ville, mais harcelés par les patrouilles allemandes, ils refluent vers le casino et sont faits prisonniers. D'autres avec Pierre Dubuc, traversant toute la ville, s'infiltrent jusque sur les quais du port où ils attaquent un bateau allemand. Cernés, à court de munitions, ils sont faits prisonniers eux aussi mais réussissent à s'échapper et à regagner la plage où ils rejoignent leurs camarades avec lesquels ils se défendent désespérément à l'abri précaire du mur qui borde la Promenade. Au milieu d'eux, le capitaine Foote, aumônier du Royal Hamilton Light Infantry, se dévoue sans souci des risques auprès des blessés et des mourants.

Roberts a fait aussi débarquer le Commando "A" des Royal Marines. Le Colonel Phillips à la tête de sa formation s'approche de la côte sous un feu terrible et se rend compte immédiatement de l'impossibilité absolue de tout débarquement. Debout sur le pont de son embarcation, il fait signe aux autres bateaux de faire demi-tour afin de se mettre à l'abri de l'écran de fumée, jusqu'à ce qu'il s'écroule, mortellement atteint, sauvant ainsi la plupart de ses hommes.

Quatre heures après que les premières vagues d'assaut ont été débarquées l'échec de l'opération est total, en dépit des remarquables succès locaux obtenus par les groupes de Peter Young et de Lord Lovat. C'est aussi un désastre stratégique. Légèreté et improvisation dans la préparation, manque de jugement, dilution des responsabilités, choix désastreux du site de débarquement, tel est le diagnostic que ne manquera pas de poser l'État-major allié qui en tirera les leçons pour assurer le succès du débarquement en Normandie deux ans plus tard.

Rembarquement

Mais à Dieppe, le 19 août 1942, "Vanquish", nom de code pour l'ordre d'évacuation des plages, est lancé pour 11 heures. Les opérations de rembarquement s'effectueront sous la protection des canons du Calpe et des autres destroyers qui se sont avancés le plus près possible de la plage.

La Royal Air Force et la Royal Canadian Air Force multiplient leurs attaques tandis que s'intensifient les tirs de la "Flak", la défense antiaérienne allemande. 106 avions ne rejoindront pas leur base au Royaume-Uni.

À Vanquish, à 11 heures, la marée est basse et laisse toute la plage à découvert ; les hommes vont devoir la franchir sans aucune protection pour se jeter à la rencontre des bateaux sauveteurs. Le tir incessant des armes automatiques, celui des mortiers, les explosions d'obus, le hurlement des avions qui attaquent en piqué, les cris des blessés enfin, transforment la plage en un véritable enfer et le repli en carnage.

Pendant que les rares rescapés regagnent le Royaume-Uni, là-bas, des captifs par centaines entament leur longue marche vers les camps de prisonniers. Les blessés et les morts, eux, gisent sur les plages, là où ils sont tombés, tandis que la mer montante les recouvre peu à peu.

Le bilan

À la tombée de la nuit la flotte rejoint l'Angleterre, le bilan humain est désastreux. À terre, sur les 6 000 hommes engagés, les pertes sont de 3 627 hommes (morts, blessés ou prisonniers), la marine a perdu 550 hommes, l'aviation 153 hommes dont 113 tués, les rangers 13 hommes. Le total des tués, toutes armes confondues, serait de 1 255.

Les pertes humaines pour les Canadiens sont terribles : 3 367 hommes sont morts, blessés ou prisonniers (dont un millier de morts). Les Canadiens n'ont jamais subi et ne subiront jamais autant de pertes dans une division en une seule journée de toute la guerre en Europe. Ils ne sont cependant qu'une partie des 45 000 Canadiens tués au combat au cours du conflit. Les commandos ont perdu 247 hommes. Les Canadiens ont laissé entre les mains de l'ennemi 1 306 prisonniers.

Pendant les 11 mois de toute la seconde campagne de France et de la campagne d'Allemagne de 1944 et 1945, ce total de prisonniers ne sera jamais atteint.

Les habitants de Dieppe pleurent 40 morts et 40 blessés graves dans une ville en flammes. Les pompiers dieppois, pris sous le feu des belligérants, ne pouvant agir partout. Dès leur arrivée en Angleterre toutes les ambulances de la région attendent les blessés, au nombre de 600 à 700, qui sont immédiatement dirigés vers les hôpitaux. Les chirurgiens vont opérer pendant 48 heures sans discontinuer.

2 000 hommes au total sont faits prisonniers. Parmi eux : le général Southam, les lieutenants-colonels Merritt, Labatt, Jasperson et Catto. Après un interrogatoire et une vaine tentative de diviser les Canadiens anglophones des Canadiens francophones, tous prennent le chemin des camps de prisonniers, l'oflag VII B à Eichstatt et le stalag VIII B de Lansdorf. Une malencontreuse directive récupérée à Dieppe va entraîner des représailles sur ces prisonniers. Cette directive prescrit en effet de lier les mains des prisonniers canadiens qui seraient faits à Dieppe.

Les Allemands vont y prendre prétexte pour attacher les mains des 300 officiers canadiens et britanniques capturés. Cette mesure va persister plusieurs mois, mais devant le nombre d'Allemands capturés ensuite par les Alliés, cette mesure sera rapportée. Les blessés prisonniers sont emmenés à l'hôtel Dieu de Dieppe et à l'hôtel Dieu de Rouen où les religieuses, faisant preuve d'un dévouement exemplaire, vont s'occuper d'eux. Ils seront ensuite envoyés en Allemagne à leur tour.

La majorité d'entre eux sera libérée en avril 1945 par l'armée américaine après avoir échappé de peu à un bombardement massif de leur camp. Des C-47 Dakota les ramèneront en Angleterre, puis au Canada.

Les Allemands vont faire regrouper les morts (par des civils dieppois) au cimetière municipal de Dieppe. Plus tard, ils seront envoyés au Canadian War Cemetary des Vertus (commune d'Hautot sur Mer), où ils reposent toujours. Ils sont 787 à reposer à Dieppe (au côté de 172 tués dans les combats de 1940 et 1944). 2 Français, 1 Australien, 3 Polonais, 4 Néo-Zélandais sont enterrés avec eux.

D'autres se trouvent au cimetière de Brookwood en Angleterre, d'autres encore reposent dans les cimetières de villages du littoral de la Manche (des corps ayant été rejetés par la mer jusqu'en Hollande). Quelques uns ont été repris par leur famille. Beaucoup n'ont jamais été retrouvés. Les pertes en matériel sont très élevées. Tous les chars sont détruits. 98 avions ont été abattus mais 30 pilotes ont été recueillis. Le destroyer Berkeley a été coulé, 30 péniches de débarquement ont connu le même sort, un matériel important a été abandonné sur les plages (antichar, armes légères, landing-crafts, ...).

Les Allemands auraient perdu environ 600 tués et blessés, les chiffres réels n'ont jamais été publiés. Les Alliés ont abattu 48 avions allemands. Une batterie lourde, un dépôt de munitions, une batterie de DCA ont été détruits. 37 soldats allemands ont été ramenés en Angleterre. 100 avions ont été détruits à Abbeville par le raid de bombardiers.

Pour récompenser l'attitude prétendument amicale des Dieppois envers les troupes allemandes, 1 800 prisonniers de guerre de Dieppe et de la région sont libérés de leurs stalags. Ceux de Varengeville et Berneval où le raid a eu des résultats positifs en sont exclus. Si les listes établies prévoient 1 800 libérations, il semble qu'en réalité ils ne seront que 1581 à arriver à Dieppe. C'est pourtant la seule conséquence heureuse de ce raid.

Du débarquement de Dieppe, Eisenhower dira : "Sans Dieppe, nous n'aurions pas eu la plupart du matériel spécial et les connaissances nécessaires au bon déroulement de l'invasion".